JdE 13 : Amérique Latine et Europe

Publié le par Martin

Samedi 22 août, la dernière de ces Journées d'Eté.
Etant arrivé un peu en retard ce matin-là, et l'amphi étant plein, j'ai suivi la plénière Classes dangereuses, libertés dangereuses via le grand écran installé dans la cour. Avec moins d'assiduité, sans papier ni crayon. Mais les interventions d'Hélène Flautre (députée européenne Verte) et de Noël Mamère (député-maire [hum ! hum !] de Bègles), entre autres intervenants, étaient rafraîchissantes.

Ensuite je me rendis à unn atelier consacré à l'Amérique Latine et à ses relations avec l'Europe.
Les intervenants, sont principalement Maria Portugal (membre de la commission Transnational), Catherine Grèze (députée européenne Verte), Alain Lipietz (ex-député européen Vert). Par la suite, plusieurs personnes de la salle vont prendre la parole, y compris un député Verts brésilien, dont je n'ai pas retenu le nom, excusez-moi.

CATHERINE GREZE
Catherine Grèze appartient à la coordination des Verts Mondiaux (Global Greens). Et depuis peu, elle est membre de la commission développement au Parlement européen ; ainsi que de la délégation "Eurolat", créée en 2006, qui est une assemblée paritaire de parlementaires européens et latinoaméricains.
Eurolat, c'est un endroit politiquement important car le Parti Populaire Européen (PPE) et en particulier le PP espagnol, utilisent cette structure pour aider les droites latinoaméricaines. Ainsi le PPE a t'il de fait validé le coup d'Etat au Honduras.
Mais Catherine veut nous parler essentiellement des Verts en Amérique Latine.
D'abord il y a un contexte politique global à prendre en compte : la tradition politique des caudillos, qui ne laisse pas beaucoup de place à des partis Verts comme en Europe.
Quant au bilan des gauches au pouvoir depuis quelques années, il n'est pas très satisfaisant. Les Verts ont soutenu, faute de mieux, mais au Brésil par exemple, la politique de Lula c'est aussi : le productivisme, les OGM, la relance du nucléaire.
En Amérique Latine (Amérique de Sud + Centrale + Mexique), il y a deux partis Verts importants : le parti Vert brésilien et le parti Vert mexicain. Les autres partis sont, le plus souvent, marginaux, bien que parfois en progrès.
Le Parti Vert Mexicain (Partido verde ecologista de México) oscille autour de 7 à 8 % des voix. Il a beaucoup d'élus, et est très fort sur les thématiques environnementales et des peuples autochtones. Mais il n'a pas de ligne politique sur l'économie, et se vend au plus offrant.
Le Parti Vert brésilien (Partido Verde do Brasil) nous ressemble beaucoup, du point de vue de sa sociologie, de ses résultats, de son programme... Il a 17 députés fédéraux et a présenté 10 000 candidats autonomes dans les municipalités en 2009.
L'évènement actuel pour les Verts du Brésil, c'est le ralliement de l'ancienne ministre de l'Environnement de Lula, Marina Silva. Elle a adhéré aux Verts et sera sans doute son candidat à l'élection présidentielle de 2010, avec des chances de l'emporter. Elle avait démissionné du gouvernement après un désaccord sur un projet destructeur pour l'environnement.
Le Parti Vert Bolivien est structuré depuis 2 ans, rassemblant essentiellement des intellectuels et des paysans. Il ssont en lien étroit avec les Verts mondiaux, car ils ont du mal à exister dans le contexte du président Morales qui occupe tout le terrain dans la gauche du pays.
En Colombie, le Partido Verde Oxigeno (d'Ingrid Betancourt) est destructuré.
Le Partido Verde d'Argentine se structure depuis deux ans, mais il existe surtout à l'échelle locale, en parallèle avec les mouvements sociaux.
Au Chili il exista un parti Vert au début des années 1990, rapidement intégré au Parti Humaniste ; récemment s'est créé le Partido ecologista de Chile, qui soutient, comme le PH, la candidature de l'ex-socialiste (certains diront blairiste) Marco Enriquez-Ominami à la présidence (les élections auront lieu en décembre 2009).

ALAIN LIPIETZ
Alain Lipietz a été président de la délégation du Parlement européen auprès de la Communauté andine des nations.
Les relations entre Europe et Amérique Latine forment ce qu'on appelle le "bi-régionalisme", très peu étudié. Deux blocs multinationaux avec des relations asymétriques. L'Amérique Latine n'a pas réalisé l'unité un temps rêvée par "le libérateur" Simon Bolivar, qui déclara avant de mourir en 1830 : "j'ai labouré la mer". Car si en Europe nous avons un marché commun sans souveraineté à la hauteur (ce qui donne le libéralisme économique), l'Amérique latine n'a ni l'un, ni l'autre.
Dans le cadre du développementisme de la CEPAL (Commission économique pour l'Amérique latine et la Caraïbe, organisme de l'ONU) depuis les années 1950, ont vu le jour divers marchés communs sous-régionaux... sans structure politique adaptée. Exemples : Mercosur, Communauté andine, Cariforums, Marché commun centraméricain...
De temps en temps, l'exemple européen motive des initiatives ambitieuses... qui ne donnent rien, comme la Communauté sudaméricaine des nations lancée en 2004 (et remplacée récemment par l'Union des nations sudaméricaines).
Néanmoins, la constitution vénézuélienne prévoit dans son texte la cession future de sa souveraineté monétaire à un organisme continental.
Les causes de cet échec sont à la fois propres au continent, mais aussi liées à l'Union européenne. En effet l'UE a beau être un modèle, c'est aussi un club de "requins", anciennes puissances coloniales, dont les intérêts déterminent le comportement de la Commission européenne. Par exemple, les entreprises françaises sont, pour les latino-américains, un ennemi immédiat (surtout dans le domaine de l'eau : Veolia...).
En UE il y a une schizophrénie entre les Affaires étrangères, qui reconnaissent les asymétries entre les deux continents, et la "DG Trade" (Direction générale du commerce) qui veut obtenir des accords de libre-échange à tout crins, avec protection des brevets européens, etc.
Les négociations pour un accord avec l'UE ont donc échoué partout... sauf dans les pays très pauvres (Caraïbe, Amérique Centrale) qui sont bien obligés d'être gentils pour recevoir l'aide au développement. (Les négociations s'appuyant sur trois piliers :dialogue politique, "coopération" pour le développement, et accord commercial).
Les Verts sont pour le principe des accords, mais contre ce qui se passe concrètement, sous l'impulsion de la DG Trade.
L'OMC est "un canard auquel on a coupé la tête", elle ne supervise plus rien donc tout ce qui se fait, ce sont des accords bilatéraux. Donc aujourd'hui en Amérique Latine ce n'est plus l'OMC que l'on critique, mais l'UE directement : elle est devenue le "nouveau Satan".
Le modèle de la gauche latinoaméricaine, c'est la CEPAL, selon le mécanisme : production d'exportation donc rentrée de devises avec lesquelles on finance l'industrialisation (par substitution d'importations : ISI). Le problème c'est que ces exportations, sont en large mesure agricoles... et que l'Europe ne veut pas ouvrir son marché agricole.
Une unification alternative non productiviste est-elle possible ? Avec la banane équitable, etc. Le problème c'est que les dirigeants ne veulent pas d'un accord car ils sont bloqués sur leur modèle cépaliste, productiviste, modèle qui est hégémonique à gauche, même en Bolivie aujourd'hui.
On a donc en Amérique Latine aujourd'hui : d'un côté les écologistes et indigénistes, et de l'autre côté les productivistes.

Publié dans Archives 2007-2010

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