A Black Guy to the White House. 2. Pessimism.

Publié le par Martin




Jusqu'à récemment, je n'étais pessimiste que par principe sur les chances de victoire présidentielle de Barack Obama. Pessimiste par principe histoire de parer à toute éventualité et de ne pas se réveiller avec un gros mal de tête le mercredi suivant le premier mardi de novembre. Mais dans le fond, je n'étais pas très inquiet: comme tous les media, ici et ailleurs, en Europe comme aux Etats-Unis, nous le répètent depuis avant les élections au Congrès de 2006, au moins, j'avais la conviction qu'en 2008, ce serait au tour des démocrates d'occuper la Maison Blanche, après 8 ans de gestion républicaine majoritairement jugée catastrophique par les citoyens concernés.

La stupidité des remarques de mon prof de sciences politiques renforçait presque, paradoxalement, mon optimisme: " "ils" ne laisseront jamais un noir qui a un middle name à consonance arabe être président des Etats-Unis", etc. S'il n'y avait pas d'argument plus convaincant pour se desespérer, alors on pouvait dormir sur ses deux oreilles.

Et puis je suis tombé sur plusieurs trucs qui m'ont fair retomber sur terre. D'abord, cette inquiétante page web de Gallup, important institut de sondage, qui donne Obama et McCain à égalité de façon quasi invariable depuis plueiurs semaines, malgré la dramatisation de la course des primaires, la surexposition médiatique de obama et l'absence d'attaque d'envergure contre son image, pratique dont les républicains sont friands. A égalité seulement jusqu'au retrait officiel de Clinton, qui a redonné un peu d'air à Obama. A suivre, mais pensons que les campagnes de salissures n'ont pas encore commencé.

Ensuite, je tombe sur cet article de Politico (http://www.politico.com/news/stories/0608/11182.html) qui suggère que Obama pourrait subir une réedition du douloureux épisode de 2000, remportant le vote populaire mais perdant le collège électoral. En effet l'ampleur de son succès parmi les élites libérales des Etats de toute façon acquis aux démocrates (Nord-Est, Californie, essentiellement) et la mobilisation sans précédent de l'électorat noir dans les Etats tenus par les Républicains avec des marges peut-être insurmontables (Louisiane, Caroline du Nord, Mississippi, Géorgie, etc.) pourrait booster son score national mais en rien l'aider à conquérir plus de grands électeurs que John Kerry en 2004. A propos, il est bon de rappeler qu'il y a quatre ans, s'est presque déroulé un scénario inverse: malgré une énorme marge nationale (trois millions), Bush est passé à deux doigts (120 000 voix) de perdre la présidence dans le seul état de l'Ohio. Dans le cas qui nous intéresse (ou pas, à vous de voir), les  démocrates ont peur des éventuelles faiblesses de Obama parmi l'électorat blanc, respectivement ouvriers et retraités, des Etats décisifs que sont la Pennsylvanie et l'Ohio d'une part, et la Floride d'autre part.

Structurellement, les faiblesses gigantesques de Obama sont pointées du doigt par Noam Chomsky (voir notamment http://www.rebelion.org/noticia.php?id=65392 ). D'abord le fait qu'il soit noir (ou plus ou moins, ce qui revient au même: il n'est pas blanc), ce qui risque de lui aliéner jusqu'à une partie de l'électorat traditionnellement démocrate, en particulier dans les Etats clé.  Ensuite, la "machine diffamatoire" des républicains, qui ont de leur côté et de toutes ses forces, la chaîne de télé FOX, au moins. Chomsky dans l'interview dont j'ai mis le lien, réalisée avant les primaires, dit que l'efficacité de la diffamation serait aussi forte contre Clinton que contre Obama. Pour ma part j'en doute, pour deux raisons. D'abord, Obama est un personnage au "record" encore largement inexploré. En d'autres termes, c'est une vraie matière première toute disposée à la salissure (contrairement à Clinton, qui a déjà passé 16 ans sous le feu des projecteurs et les crachats de ses ennemis). Ensuite, Obama est "intrinsèquement" vulnérable aux entreprises visant à saper sa popularité: il a un passé trop à gauche pour plaire, de longues amitiés quasi antiaméricaines (Reverend Wright), bref une mine inespérée pour les groupes pro-McCain. Il est probable qu'ils attendent que la campagne entre dans sa phase finale (les deux derniers mois), pour faire usage de ce type d'armes fatales.

Quant à l'avantage financier dont dispose Obama, il est tout relatif, si l'on prend en compte les ressources des partis respectifs. Les dons aux National Commitees respectifs sont très à la faveur du parti Républicain, car ils ne sont pas plafonnés, et on sait de quel côté sont les gros lobbies.

Enfin: l'enthousiasme suscité par la candidature de Obama risque de retomber dans les cercles progressistes. Les grands mots The new politics, Change, etc, ont des chances de se réveler être de simples coquilles vides. La fin de la bataille des primaires, qui se limite jusqu'à un certain point au choix d'une personne (dans le sein d'un parti relativement homogène idéologiquement), et le début de la campagne nationale, qui met un peu plus l'accent sur le contenu des propositions en jeu, vont demander des efforts de concrétisation de la part des deux candidats qui restent en lice. Les premiers indices sont peu rassurrants en ce qui concerne Obama. Alors que pendant les primaires, il avait dénoncé l'impopulaire traité de libre-échange nord-américain (NAFTA), annonçant son intention d'amémnager profondément ses termes et son application, il vient de nuancer sa position, en partie sans doute pour ne pas s'aliéner les grands groupes commerciaux et l'establishment de la pensée économique (http://www.thenation.com/blogs/thebeat/330911).Virage qui devrait en particulier affaiblir d'avantage ses positions en Ohio et Pennsylvanie...
Plus structurellement, son discours économiquement redistributif serait purement et simplement démagogique, semble suggérer Naomi Klein sur le même site (http://www.thenation.com/doc/20080630/klein). Elle pointe du doigt le monopole qu'exercent les économistes néo-libéraux dans son "economic policy team".
Un signe du début de la fin de la lune de miel: l'hebdomadaire de gauche The Nation, tant de fois mentionné, pendant les primaires presque unanimement dédié à la défense de la candidature de Obama contre Clinton, commence à froncer sérieusement les sourcils.

En conclusion: je suis pessimiste. Obama va sans doute perdre. Et s'il gagne, ce ne sera pas mieux








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